Témoignages

Un homme m’a mis la main aux fesses sans mon autorisation

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Il y a quelques mois, il m’est arrivé une chose toute bête et certainement très courante, en rentrant du travail un peu tard, un soir. Je suis plutôt de nature méfiante et si je sens qu’une personne marche un peu trop près derrière moi, j’ai tendance à ralentir le pas. D’autant plus que Nanterre n’est pas ce qui se fait de plus accueillant pour une femme seule, à la nuit tombée.

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Cette fois-là, j’ai simplement tourné la tête pour m’assurer que ce n’était pas le croquemitaine qui avançait derrière moi

Et non, à l’évidence, ce n’était pas le croquemitaine, mais un jeune homme qui faisait son footing. Traduction : footing = personne ayant de saines occupations = aucun danger. D’autant qu’à ce moment-là, j’étais au téléphone avec mon mari et que le simple fait d’entendre sa voix me donne la sensation que je n’ai rien à craindre.

Je me suis arrêtée au feu. Le jeune homme aussi

Il s’est posté derrière moi, mais je n’ai pas relevé. Habituellement, je m’arrange instinctivement pour me mettre à niveau. Mais là, non, j’étais occupée à ma conversation et, comme je l’ai dit, plutôt rassurée par l’idée du type en plein dans l’exercice d’une activité saine.

C’est à ce moment-là que je l’ai sentie, sous ma jupe

Cette main affreusement entreprenante.

Il faut un moment pour mettre une image sur une sensation, pour comprendre ce qui arrive, pour se retourner, crier

(ou lui mettre un poing dans la gueule, mais je n’ai pas ces réflexes-là). Un moment assez long pour qu’on ait l’impression, une fraction de seconde, d’avoir laissé faire la main, de l’avoir invitée. Lorsque j’ai compris, je me suis dégagée comme après avoir été piquée par une guêpe et j’ai aboyé des insultes. Pendant que je m’époumonais, il a repris sa course. Impossible de le suivre. Officiellement parce que j’étais en talons hauts, officieusement parce que j’étais pétrifiée. Au sens littéral : je ne pouvais plus bouger. Et puis je me suis mise à trembler comme une feuille.
h2ng>C’est surprenant ces moments où le corps impose sa volonté

Une personne en voiture, qui avait vu la scène, a eu la bienveillance de s’arrêter pour s’assurer que tout allait bien. Oui. Tout allait bien. Après tout, il ne m’était rien arrivé de très grave. Cette personne ne m’avait rien cassé, rien volé, elle ne m’avait pas blessée. Même pas un tout petit peu. C’était juste une petite frayeur. Rien de grave.

J’ai attendu que mon cœur cesse de battre à faire mal

J’ai repris mes esprits grâce à la voix inquiète et apaisante de mon homme à l’autre bout du fil. Et j’ai estimé que bon, allez, ça suffit, ça n’est jamais qu’une main aux fesses, rien de bien méchant, tous les ados font ça. Qu’est-ce qu’une main aux fesses, franchement ? Exactement : rien du tout. Cinq minutes plus tard, j’avais catalogué l’affaire au rang des désagréments bénins et je rentrais chez moi.

Sauf que.

Sauf que quelques jours après, une scène comparable s’est reproduite, ailleurs

Un type derrière moi qui faisait son footing. À ma propre surprise, je me suis arrêtée net, incapable de faire autrement. J’ai regardé le type comme s’il avait abattu ma famille sous mes yeux. En serrant la mâchoire, j’ai attendu qu’il passe. J’ai senti le sol devenir mou sous mes pieds. L’homme s’est éloigné et le malaise est passé comme il était venu.

Rien de bien grave en somme. Mais depuis, chaque fois que je sens la présence d’une personne près de moi, que je perçois un souffle, un pas, une allure, je ralentis le pas. Ou j’accélère. Bien entendu, je trouve ça ridicule de sursauter à tout bout de champ. Mais mon corps, apparemment, n’est pas de cet avis : il tressaute, il s’arrête, accélère, se crispe.

J’ignorais qu’un instant de peur pouvait imprimer sa marque aussi fort dans l’esprit de quelqu’un. Une petite peur de rien du tout pourtant… une petite peur pas grave.

A propos de l'auteur

Cachemire et Soie

11 commentaires

  • ah ces hommes qui se croient tout permis. Ce n’est pas ridicule c’est quand même traumatisant de se faire peloter (main aux fesses) sans avoir rien demandé à personne. Par contre, tu ralentis toi moi c’est le contraire j’accélère (prête à courir). Dans la rue, généralement, je marche vite quand je suis seule et j’ai un parapluie

  • “une petite peur pas grave” certes mais une agression tout de même ! il a atteint ton corps sans permission et c’est une atteinte à ton intégrité. C’est normal que tu craignes maintenant que ça se reproduise. ça va passer mais il ne faut pas minimiser je pense les “petites peurs”…

  • tout à fait d’accord avec Barb…il n’y a pas de petits gestes anodins, ça reste dans ton esprit comme un “traumatisme”, tu le dis c’est plus fort que toi…la mémoire du toucher c’est un sentiment aussi fort que la vue d’une scène violente par exemple, ton corps en garde la marque…bon bien sûr je pense que tu “oublieras” plus rapidement que si il s’agissait de quelque chose de plus grave mais il ne faut pas minimiser, il faut te laisser le temps de “digérer”…ou prendre des cours de “self-defense”!

  • Je pense comme Barb, les mains au fesse on pense souvent que ce n’est pas grand chose mais ça l’est. C’est un peu comme si on était de la chair à saucisse sur patte que monsieur pouvait tater comme bon lui semble.
    C’est désagréable et dans un sens agressif.

  • Je suis d’accord avec Barb: une main aux fesses n’est pas rien. Une agression de ce genre m’est arrivée il y a quelques années et je pensais que ce n’était rien puisqu’on ne m’avait finalement pas fait de mal (j’avais crié et l’agresseur s’était enfui).
    C’est faux, c’est à notre féminité que cela fait mal, moi j’en ai fait des cauchemars pendant plusieurs semaines. Il ne faut pas minimiser ce geste, mais comme le dit Amaya le digérer.
    Il n’y a que comme cela que tu pourras le surmonter et que la peur pourra s’envoler.

    Ecrire cet article est une très bonne chose je pense.

  • Presque deux ans après avoir été menacée de mort par mon voisin pour lui avoir demandé de baisser sa musique, j’ai toujours le signal d’alarme qui s’allume quand j’entends du rap ou que quelqu’un fait une fête dans l’immeuble… je précise qu’entre-temps j’ai déménagé de quelques 1041 km. Le type ne m’a pas touchée. Mais j’ai “imprimé”.

  • Se prendre une main aux fesses n’est pas une anecdote anodine, surtout dans ces conditions… Le mec qui le fait t’agresse physiquement, il ne se “contente” pas de se frotter à toi dans le métro, ce qui n’est pas plus excusable bien sûr. Celui-là t’a vue, t’a choisie, t’a suivie. C’est déguelasse.
    Excuse-moi, je suis un peu véhémente mais je comprends totalement, ça m’est arrivé pareil, un beau matin, le mec faisait son footing, j’étais étudiante, c’était de bon matin dans une banlieue rurale. J’ai échappé au pire en hurlant, et pour être honnête j’ai mis des années à m’en remettre et à ne plus flipper lorsque je croise un mec qui fait son footing, ou à entendre une respiration derrière moi.
    Je sais que ça semble n’être rien, à l’échelle de l’humanité, que des choses bien pires peuvent arriver. C’est ce que j’essayais d’expliquer à un psy auquel je racontais cette mésaventure, mais celui-ci m’a rétorqué que se faire agresser physiquement équivaut à toutes les guerres.
    Alors t’inquiète, c’est normal d’avoir peur, et tu y penseras encore parfois, même si ça ne semble rien sur le coup. Les mecs comme ça réussissent, par un geste “anodin”, à nous faire nous sentir de pauvres proies sans défense face à des loups. Ils marquent l’esprit, et c’est à cause d’eux qu’on redouble de prudence et qu’on peut sembler parano aux mecs.
    Enfin, je pense que ça arrive à tout le monde, soyons prudentes ! Sur ce, je sors car c’est bien la première fois que je ne laisse pas un com’ second degré.
    Merci pour cette note réaliste et bon courage, quand tu as peur, pense à nous !

  • Alooors, moi j’ai eu droit à:

    – la main aux fesses sous toutes ses techniques :
    Le djumbé (soit un tambourinage de mon fessier sur un escalator),
    Le poulpe (passage de la main de l’inconnu vers mon entrejambe avec agitation des doigts),
    Le cycliste (même configuration que pour Cachemire et Soie mais à vélo).

    – la main au ventre, encore par un cycliste, je vais finir par en tirer des conclusions

    – la main à la cha*** dans le metro pendant la cohue

    – le frotti frotta contre mes fesses, toujours dans le métro, j’ai decidément un problème avec les transports en commun..

    Et le sommum : l’exhibitionniste qui se touche l’engin à côté de moi dans le bus.
    Pour cette dernière, contrairement à toutes les autres fois (syndrôme de la pétrification post attouchement), j’ai vraiment réagi : d’abord j’ai flanqué mon coude violemment dans le nez du pervers, puis je l’ai insulté, puis j’ai porté plainte auprès de la police.
    Mais bon, vu le peu d’entrain qu’à mis la police à tenter de trouver une solution, alors que j’avais pu me procurer par le biais du Sytral (société qui gère les bus à Lyon) la vidéo de mon agression, il n’a jamais été retrouvé et doit à l’heure qu’il est montrer son vilain zizi à une autre fille.

    Tout ça pour dire que ce genre d’agression est très peu reconnu alors que très traumatisant. Suite à mon dernier épisode du genre, j’ai été très choquée, j’ai même eu un mini blocage sexuel (heureusement de quelques jours seulement). Mon copain aussi a été très contrarié de ne pas avoir pu intervenir (ben oui, il était pas avec moi) et depuis, il angoisse chaque fois que je prends le bus.
    C’est nul, mais j’ai une envie de vengeance si tenace que je rêverai de le reconnaître dans la rue, d’être à ce moment là avec mon copain, et que celui-ci lui pête sa gue***.

    Ceci dit, même si ça m’a traumatisé, j’en veux moins à ce pervers car il faisait franchement malade, qu’aux petits cons qui font ça pour se marrer dans la rue car ils nient vraiment le fait qu’on soit des personnes, pas juste des nichons et des fesses ambulantes.

    PS : je me suis jamais pris de main aux seins, voilà le seul avantage à faire du 85A, ça attire pas le regard des vicelards!

  • Hum, main aux fesses, main aux seins, même combat … dans les transports en commun, notre postérieur est le plus exposé, mais j’ai eu droit aussi au coup du camion (ou autrement dit “Pouet, pouet”) en pleine rue. Le type s’est barré aussitôt alors que je lui lançais un “Mais ça va pas la tête!” mais ça marque. Et ça fait cogiter. Et de 1) parce que même si la plupart de ces “agresseurs” n’iront pas plus loin, on ne peut s’empêcher d’y penser … et de 2) on se retrouve face à nos instincts primaires et on réalise que nos réflexes de défense sont passablement émoussés (mais pourquoi je suis restée bloquée comme une conne et que ma seule réaction a été de lui crier dessus?) et de 3) personne ne réagit. Autour. Et ça, c’est pas rassurant …

  • J’acquiesce aux commentaires qui suivent ton article : il vaut mieux ne jamais minimiser ses traumatismes (c’est ma psychothérapie qui m’a appris ça), même si on trouve son événement déclencheur “pas grave” voire “ridicule”.
    Et puis un homme qui se permet tout, c’est pas rien : il va aller jusqu’où ? Il est plus fort, quel moyen pour se défendre ?!
    J’ai au compteur 2 mains aux fesses dans la rue mais par “chance”, un contexte pas traumatisant (plutôt des ados ricanants qu’un type inquiétant). J’ai toujours répondu par la salve d’insultes en suivant le gars (ça défoule et il se prend un peu la honte qu’il mérite). La dernière fois c’était l’année dernière et j’ai couru après le type (bon je cours pas vite) en hurlant “lâche !”. Ça a au moins le mérite de soulager.
    Un frotteur aussi une fois, dans un tram, le paquet bien collé où il faut. Au premier coup de frein du tram, je lui ai savamment écrasé le pied (non sans jouissance, j’avoue) en hurlant “Oh ! pardon !” d’un air désolé. Ça l’a décollé aussi sec GNIARK ! Je crois que ça fait vraiment du bien de se venger (quand on peut le faire).
    Les jupes, bin… Moi les deux fois j’étais en jogging moche !

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